Lettre d'information du 25 mai 2013
Vous avez raison !
Taille et travaux d’hiver terminés, végétation démarrée, tout reste néanmoins à faire, et parler de la qualité du millésime à venir n’a donc pas le moindre sens.Le Château de Pouypardin le 17 avril 2013, vue de l'ouest.
Malheureusement (ou plutôt « unfortunately » qui serait plus juste mais dont il n’existe pas de traduction littérale à part « infortuné - ment »… hem…), ...« infortunément » donc, il y aura toujours un quarteron de bouffons prêt à vendre du bla-bla, du papier, en spéculant sur l’ignorance supposée du consommateur : pourvu que ça ait l’air vrai, que ça sonne bien et l’affaire est dans le sac !Lisez à cet effet notre article en forme de polémique sur les vins « faciles à boire », les « vins non filtrés » et autres âneries saisonnières.Pour le vin comme en toutes choses, une seule leçon à retenir : il n’est pas vrai que le savoir serait propriété exclusive de quelques uns : votre opinion ne dépend que de vous. A l’heure du choix, exigez du concret et des thèses rationnelles. Votre plaisir de dégustation sera d’autant plus grand que vous aurez au préalable raisonné votre choix. La polémique du mois : vins non filtrés, vins naturels, vins pré phylloxériques : comment se rendre intéressant à peu de frais ou …..les sornettes au service de Guignol !Le point sur quelques âneries soigneusement élaborées et complaisamment relayées par la fameuse compagnie des bouffons. Lorsque vous entendrez un propos ou commentaire ressemblant de près ou de loin à l’une des expressions qui suivent, prudence (!), le guignol rôde, et l’arnaque n’est jamais loin….
Revue de détail donc en forme de (petit) dictionnaire : à lire en se gaussant car il faut vraiment en rire .... Et à compléter : aujourd’hui encore au journal télévisé, intervention d’un caviste sommelier (prononcez : « saumeullié-kawisst ») qui explique qu’à la vigne le sol doit absolument être travaillé (le pauvre garçon......). Une ânerie de plus que nous traiterons ultérieurement mais qui nous rassure à point nommé : pendant les travaux ….. le spectacle continue…… !Revue de détail disions nous :« Vin facile à boire »Expression qui désigne en général un vin difficile .... à vendre. Prononcée donc le plus souvent par ..... le producteur lui-même, cette véritable tarte à la crème de la viticulture contemporaine est censée définir un produit dans l’air du temps, lénifiant et fluide, qui ne vous fatiguera pas, par opposition au vin (évidemment) compliqué vendu par le voisin. Un vin « facile à boire » doit être acheté impérativement sans se poser la moindre question.
Vous savez donc ce qui vous attend ! « Vin naturel »Par opposition aux autres producteurs (dont le vin obtenu à l’issue d’un nombre d’opérations évidemment suspectes est donc inévitablement trafiqué), le producteur d’un vin naturel est un citoyen du monde.Toujours en parfaite symbiose avec la nature, ce bienfaiteur du genre humain se limite à accompagner une nature généreuse et vous présente, avec la sérénité modeste mais satisfaite de celui qui sait, un breuvage millénaire sans aucun artifice, comme Adam déjà en préparait pour Eve (la suite on la connaît).Fin du spot bonimenteur et retour sur terre : la nature ne sait faire que du vinaigre, et par surcroît ce vinaigre se révèle de piètre qualité (bien loin donc de Modène) …..
Le vin est œuvre humaine, et parler de vin « naturel » n’a donc aucun sens. Un mot tout de même pour insister sur le scandale véritable que représente l’usage de plus en plus systématique de ce terme, usurpé dans le but délibéré d’abuser le consommateur. « Vin non filtré »Toujours dans le même registre, toujours par opposition aux affreux manipulateurs, mais un peu plus élaboré (à défaut d’être plus finaud), voici maintenant le vigneron qui respecte le produit (lui) et ne le filtre donc pas car (explique-t-il) filtrer « appauvrit » le vin.L’argument porte un instant car il semble sauter aux yeux qu’un filtre va retenir une part des composants et donc, ajoute-t-il, dénaturer le produit. Et pour preuve, (ou excuse), en voilà qui servent d’étonnantes mixtures, tantôt voilées, tantôt troubles, ou alors affublées d’un dépôt qui, à la bonne heure, démontre bien (à l’incrédule que vous êtes) à quel point son produit est naturel (encore). Quel fatras que ces boniments ! Essayons d’y boire un peu plus clair :
- à l’issue des fermentations, le vin comporte en suspension (effective ou en puissance), toute une série d’éléments qu’il appartient au vinificateur d’éliminer pour l’excellente raison qu’ils nuisent à l’œil et à la dégustation : il n’est pas vrai (bien que tel soit le présupposé fallacieux du charlatan lambda) qu’une couleur ou un arôme serait mieux apprécié trouble que limpide, ni que le goût du terroir ou du cépage gagnerait à s’accommoder de tous les petits corps en suspension, lies de levure, morceaux de feuilles, fragment de peaux de raisins, quand ce n’est du résultat d’un accident pur et simple de vinification ou de conservation. En résumé le vin qui vous est proposé doit être limpide et le rester.- au chai le professionnel doit distinguer la clarification et la stabilisation. La clarification d’un vin le conduit à la limpidité, puis la stabilisation au maintien de cette limpidité. Les moyens d’y parvenir sont multiples : selon les opérations à effectuer (élimination d’un trouble effectif ou prévention d’un risque), selon le type de vin (couleur, concentration, durée d’élevage, potentiel de garde, etc.…), la clarification et la stabilisation peuvent s’obtenir selon divers procédés : la filtration est tout simplement l’un d’entre eux.
- pour certaines opérations (mais certaines seulement) la clarification peut être obtenue pas d’autres procédés. On songe par exemple à la sédimentation qui permet dans certains cas d’éliminer une part du trouble. Le fait même qu’existent pour un même problème des solutions diverses dit assez à quel point d’ailleurs brandir le non-usage de la filtration au titre d’argument pseudo qualitatif devient fallacieux. Que dirions-nous de l’écrivain qui vanterait son livre parce qu’écrit au stylo bleu plutôt que noir ?
- l’argutie d’une non filtration est d’autant plus dépourvue de signification technique que, contrairement à la thèse simpliste effrontément propagée par d’aussi piteux détracteurs, une filtration bien conduite n’appauvrit pas le vin. C’est à la condition de respecter les règles de la filtration, de ne pas demander à la filtration ce qu’elle ne peut pas fournir et surtout de travailler avec grand soin, c'est-à-dire, notamment à la fois très lentement et dans la plus grande propreté. Les conditions d’une bonne filtration sont d’ailleurs à ce point astreignantes qu’un esprit mal tourné dirait que critiquer la filtration permet surtout de s’en éviter le travail….
- en résumé vous devez exiger un vin limpide, voire brillant, et pour le reste ne l’adopter que s’il vous plait. La question de la filtration est théorique et sans autre intérêt pour vous que technique.- et le dépôt ? : vaste sujet dont nous ne dirons qu’un mot et reporterons l’étude plus détaillée à une prochaine lettre d’info. Le dépôt au fond de la bouteille (nous ne parlons pas d’un trouble, ni d’un voile, ni de particules en suspension qui sont le résultat d’un accident de vinification ou de conservation) est en immense majorité composé de tartre auquel s’ajoutent avec le temps des tanins et des pigments colorants (anthocyanes). Bien qu’il soit diversement perçu par le consommateur dont l’œil et l’appréciation subjective sont influencés par nombre de paramètres (origine, style, âge, couleur du vin, etc…), le tartre qui reste au fond de la bouteille est sans aucune influence sur la dégustation. L’apparition du tartre (sa précipitation) correspond au franchissement du seuil de saturation, lequel varie pendant toute l’évolution du vin : le tartre est en solution, puis un jour précipite. Sauf à effectuer avant mise en bouteille une précipitation tartrique préventive qui abaisse le seuil de saturation (...)
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